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La réouverture par phases de l’économie
29 mai 2020
Auteur : Giel Maris, gestionnaire de fonds chez Argenta Asset Management
Malgré les tensions commerciales grandissantes entre les États-Unis et la Chine, les bourses ont enregistré de nouvelles hausses ces dernières semaines. Les marchés attachent en effet plus d’importance à la réouverture progressive de divers états en Amérique, à l’évolution favorable de la pandémie en Europe, aux chances d’obtenir un vaccin d’ici la fin de l’année et enfin à l’interview rassurante du président de la banque centrale américaine. À cela s’ajoute une proposition franco-allemande exceptionnelle afin de remettre la croissance économique européenne sur les rails.
Le COVID-19 : pouvons-nous déjà parler d’une évolution positive ?
La tendance baissière du nombre de nouvelles infections en Europe, l’optimisme lié à la réouverture de l’économie mondiale et la mise à disposition probablement plus rapide qu’initialement prévu d’un vaccin contre le coronavirus ont permis une belle remontée des bourses durant les dernières semaines.
La réouverture des états
Dans le flash précédent, nous avions mentionné l’assouplissement du confinement en Europe, et les États-Unis suivent à présent le même chemin. Le pouvoir de décision à ce sujet est dans les mains des gouverneurs des états, et non dans celles du président. Avant qu’un état puisse lever les mesures de confinement, un plan en 3 phases doit être respecté. Lorsqu’un certain nombre de critères sont respectés pendant une période de 14 jours, l’état passe à la phase suivante et les mesures sont progressivement assouplies. Le nombre de nouvelles infections, la disponibilité au sein des services de soins intensifs et la robustesse des procédures de tests jouent ici un rôle prépondérant.
En date du 26-05-2020, 24 états n’ont pas encore pris de mesures d’assouplissement afin de rouvrir leur économie tandis que 26 états les ont entamées, et New-York, l’état le plus touché, a accompli les progrès les plus importants dans la réouverture. Au total, donc, les mesures ont été assouplies dans 27 états. En comparaison avec les régions précédemment les plus touchées en Chine et en Europe, les États-Unis agissent donc bien plus rapidement. Le revers de la médaille pourrait être une plus grande probabilité de voir une deuxième vague d’infections au coronavirus. Nous suivons cette situation de près.
La course au vaccin
Les annonces prometteuses concernant la recherche d’un vaccin ont contribué au sentiment positif sur les bourses.
D’après le docteur Fauci, directeur de l’institut américain des maladies allergiques et infectieuses, et conseiller de la Maison Blanche pour la pandémie, les résultats sont très encourageants. Il a en outre ajouté qu’il était tout à fait envisageable qu’un vaccin soit disponible d’ici la fin de l’année.
Le point de la situation au niveau économique
Interview de Jay Powell
Le président de la banque centrale américaine, Jay Powell, a détaillé dans une interview télévisé la situation économique sur un ton rassurant. L’économie américaine pourrait se contracter de plus de 30 % durant le deuxième trimestre, mais évitera un plongeon économique de style dépressionnaire. Le nombre de chômeurs se rapprochera de la situation des années trente, lorsque le taux de chômage a atteint presque 25 %. Mais le phénomène sera d’une durée beaucoup plus courte. Il y a de grandes chances, selon Powell, que nous voyions une croissance positive dès le troisième trimestre. La nature de la crise actuelle, en combinaison avec la dynamique inhérente aux États-Unis et la solidité du système financier permettront de conduire à un rebond substantiel. Il n’a émis aucune spéculation sur la forme de la reprise, mais estime que les États-Unis reviendraient renforcés de cette crise. Il a cependant averti qu’un rétablissement complet n’aura probablement lieu qu’après la découverte d’un vaccin pour le coronavirus.
Parmi les facteurs qui, selon lui, nous différencient de l’époque de la grande dépression, nous trouvons une Réserve Fédérale proactive et un congrès qui a déjà approuvé l’équivalent de 3 000 milliards de dollars en fonds de sauvetage, et qui envisage de plus un nouveau paquet de soutien. Par ailleurs, la cause de la crise ne se trouve pas dans une bulle d’actifs, mais bien dans une paralysie économique provoquée par l’homme. Enfin, la banque centrale américaine possède encore suffisamment de munitions pour continuer à soutenir l’économie. Il n’y a en réalité aucune limite à ce qu’elle peut faire au niveau des programmes de crédit.
Nous nous attendons à ce que la reprise s'amorce progressivement et à ce que la situation s'améliore à partir du troisième trimestre de cette année. Beaucoup de temps s’écoulera cependant avant que la vie normale ne reprenne complètement son cours et cela nécessitera très probablement la découverte d’un vaccin.
Un pas de plus vers une « union fiscale » en Europe
La chancelière allemande Angela Merkel et le président français Emmanuel Macron ont mis sur la table une proposition exceptionnelle afin de combattre les conséquences économiques du virus. Ce plan prévoit la levée de 500 milliards d’euros par la commission européenne sur les marchés financiers, pour que ce capital ainsi constitué soit ensuite distribué sous forme de subsides aux pays les plus touchés économiquement. Chaque membre de l’Union Européenne contribuera au « fonds de relance », en fonction de sa part dans le budget de l’Union. Si ce plan franco-allemand ne subit pas de mesures d’affaiblissement, il pourrait rapprocher la zone Euro d’une union fiscale. Autrement dit, il ouvre la voie à des transferts fiscaux des pays les plus solides financièrement vers les moins bien lotis. Cela constituerait le signal que l’Union Européenne peut et veut plus que jamais combattre la pandémie en équipe.
Avec cette nouvelle proposition, l’Allemagne et la France semblent avoir « franchi le Rubicon » concernant le partage de la charge financière de la pandémie, même si ce plan doit encore être approuvé par le reste de l’Union. L’évolution dans l’attitude précédemment très conservatrice de l’Allemagne est remarquable, et les marchés financiers ont réagi très favorablement. L’Italie serait un bénéficiaire tout désigné de la création du fonds. Le rendement de ses obligations à 10 ans a diminué, dès l’annonce de cette nouvelle, de près de 20 points de base et est passé à 1,67 %. Ceci correspondait au scénario auquel nous nous attendions, et était donc favorable pour nos fonds essentiels en raison du poids important de l’Italie.
Si l’UE approuve ce plan sans trop de compromis qui l’affaibliraient, cette proposition aura des conséquences positives à long terme:
- Cela pourrait être le catalyseur pour un budget européen élargi, non seulement basé sur les contributions individuelles des États membres, mais aussi sur de nouvelles taxations étendues au niveau de l’UE.
- Nous nous rapprocherions un peu plus d’une « union fiscale » au niveau de la zone euro, un pas nécessaire pour renforcer l’Union et relancer la croissance économique.
Les tensions commerciales sont de retour
Durant les dernières semaines, les tensions entre les Etats-Unis et la Chine ont fait leur retour, mais le marché réagit assez peu à la chose. Il perçoit cette situation comme un « jeu d’accusations ». Avec l’approche de élections présidentielles en tête, Trump cherche un bouc émissaire (la Chine) pour le malaise économique actuel. Il tente ainsi de préserver ses chances de réélection.
L’évolution du taux de change entre le dollar américain et la monnaie chinoise est un bon baromètre pour évaluer ces tensions. Ces derniers jours, le taux de change a de nouveau atteint son point bas du mois d’août de l’an passé. À cette époque les tensions commerciales étaient à leur paroxysme. Une monnaie faible permet en effet à la Chine de compenser les éventuels tarifs commerciaux par des prix à l’exportation plus faibles de ses produits. Nous suivons l’évolution de cette situation de très près.
Plus son cours est haut, plus la monnaie chinoise est faible.
Quelles opérations avons-nous effectuées dans nos fonds essentiels ?
La réouverture progressive des états en Amérique, la possibilité d’un vaccin pour la fin de l’année et l’interview rassurante de Jay Powell nous rendent prudemment positifs. Nous restons cependant neutres dans notre positionnement, en raison d’une prime de risque (la rémunération supplémentaire pour le risque pris en actions) qui n’est qu’à sa moyenne historique et d’une volatilité qui reste supérieure à la moyenne (ce qui induit des mouvements de marché à la hausse ou à la baisse plus élevés que la normale). À ceci s’ajoute l’impact encore incertain que le coronavirus aura finalement sur notre économie.
Au niveau géographique, nous avons légèrement réduit l’importante pondération sur la Chine à la suite des tensions commerciales croissantes entre la Chine et les États-Unis. Par ailleurs notre préférence va toujours au marché américain en raison du soutien monétaire et fiscal qui se chiffre jusqu’à présent à 9 000 milliards de dollars, et de la forte présence des entreprises américaines au sein de nos thèmes de long terme. Nous avons renforcé ces thèmes au sein des actions durant ces deux dernières semaines.
Durant le mois de mai, nous avons activé le cash disponible en investissant dans des obligations d’entreprises européennes et américaines, ainsi que dans les obligations d’État de la périphérie. Le graphique ci-dessous donne une indication de l’exposition aux thèmes de long terme dans la partie des actions dans les fonds essentiels.
Les thèmes du vieillissement, de la fintech, de la robotique et de la sécurité ont été encore renforcés, tandis qu’au sein du thème lifestyle, un accent encore plus important a été mis sur la consommation numérique, notamment le commerce en ligne et les sociétés de gaming. La plus importante augmentation proportionnelle a eu lieu dans le thème de la sécurité, et en particulier de la cybersécurité, comme on peut l’observer à la progression de la ligne jaune sur le graphique. L’approche thématique est en toute logique appliquée à l’ensemble des fonds essentiels.
Conclusion
En raison de l’incertitude persistante qui nous entoure, il est important que nous soyons suffisamment diversifiés dans nos investissements, avec une attention particulière dirigée vers nos thèmes de long terme. Ces thèmes sont orientés vers la « nouvelle économie » qui naîtra de la crise. Dans nos fonds essentiels nous maintenons un fort accent dans ces thèmes d’investissement. Dans le même temps, nous sommes très attentifs aux risques de concentration, et à l’adéquation de chaque fonds essentiel avec le profil de risque du client investi.
Notre attention toute entière est portée vers la gestion attentive et professionnelle des avoirs de nos clients en toutes circonstances, et en particulier dans cet environnement exceptionnel qui est le nôtre actuellement.
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