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May the force be with us
20 février 2025
Ils se disent experts, ceux-là qui discernent dans des éclaboussures de peinture aléatoires sur une toile une œuvre d’art révolutionnaire, riche de sens. Nous leur accordons le bénéfice du doute. Pourtant, permettez-nous tout de même de tracer une limite, qui est franchie lorsqu’on prétend percevoir une stratégie réfléchie dans l’approche américaine visant à mener un jour à des négociations de paix avec le dirigeant russe. Nous n’y voyons qu’une série incohérente de réactions capricieuses, tirées au petit bonheur la chance comme on balancerait des projectiles non guidés sur le mauvais ennemi.
Ou comme on irait à la chasse, au son du clairon.
Peut-être espère-t-on ainsi dérouter le partenaire de négociation, mais derrière les murs du Kremlin, ce ne sont pas les perdreaux de l’année. En cédant immédiatement aux exigences russes (et même en souscrivant à leurs motivations), on se prive d’emblée de tous ses atouts.
L’Europe est mise hors-jeu, et, d’un trait de plume, on met fin à une coopération de plusieurs décennies entre l’Ancien et le Nouveau Continent. Les États-Unis ne semblent intéressés que par le rétablissement rapide de leurs relations commerciales avec la Russie, en espérant que cela leur rapporte des milliards de dollars et sape la coopération russo-chinoise. Cela vaut bien, pensent-ils, quelques lopins de terre en Ukraine.
Mais, au-delà de ces considérations tristes à pleurer, une lueur d’espoir perce peut-être. Toute forme de paix vaut mieux que la guerre. Les deux grandes puissances peuvent trouver un accord plus rapidement si elles doivent moins (ou pas) tenir compte des intérêts (potentiellement contradictoires) d’autrui.
Il est difficile de négocier avec les grands seigneurs1.
Si l’Europe est tout de même invitée à s’asseoir à la table des négociations, il faudra probablement du temps pour parvenir à une position commune, en raison des différences de vision sur le conflit.
Profondément humiliée et prise pour quantité négligeable par son principal allié, l’Europe a vu son image salement ternie. Il serait peut-être temps que l’Europe commence à se prendre elle-même au sérieux, à viser plus d’unité, au lieu de s’adonner à des querelles interminables, alimentées par une méfiance paralysante. May the force be with us, Europeans.
L’OTAN fait face à une crise existentielle, mais obtiendra à l’avenir (beaucoup) plus de budget, et se trouve déjà solidement renforcée avec l’adhésion de la Suède et de la Finlande.
Le plus grand perdant est facile à identifier. Zelensky, avec lequel le rancunier Trump avait encore un compte à régler. Le président ukrainien avait en effet refusé de transmettre des informations potentiellement incriminantes sur la famille Biden. Le dirigeant ukrainien doit maintenant marcher sur des œufs, pour le plus grand plaisir du public russe.
Les saillies du président américain à l’égard de l’Ukraine défient toute observation objective. Mais de telles diatribes ne sont que le début de ce qui nous attend. Aussi, histoire de rendre les quatre prochaines années un tant soit peu vivables, voici un conseil pour décoder ses déclarations grotesques et en retirer le message effectif : ne croyez jamais littéralement ce qu’il dit, mais prenez-le toujours au sérieux.
Mais le paysan, lui, a continué à creuser son sillon.
Sur les marchés financiers, on se borne à hausser les épaules, comme s’il fallait se résigner à ces funestes développements. Mais les bourses d’actions n’en continuent pas moins à se concentrer sur les évolutions tangibles, à savoir les données chiffrées pour y déceler des tendances durables et positives. Avec patience et capacité à surmonter les revers, et un solide pied marin pour affronter les tempêtes, cela leur réussit plutôt bien.
Malgré les turbulences géopolitiques et la crainte d’une nouvelle vague d’inflation2, l’indice S&P 500 a atteint un nouveau sommet historique, inspiré par les bénéfices des entreprises du trimestre précédent.
Avec une progression des bénéfices des entreprises américaines de 16,9 % d’une année à l’autre, le quatrième trimestre de 2024 affiche le meilleur résultat depuis la hausse exceptionnellement forte du dernier trimestre de 2021, même s’il existe de grandes disparités entre les entreprises.
Ce sont les résultats des secteurs des biens durables, de l’industrie et des institutions financières qui nous ont réservé le plus de bonnes surprises. Et donc pas le secteur technologique, comme il nous y avait habitués jusqu’ici. Les entreprises européennes affichent également des résultats et des chiffres d’affaires meilleurs que prévu, mais dans une moindre mesure qu’aux États-Unis.
Les tendances à long terme et la domination des entreprises américaines, surtout en technologie, ne sont plus une nouveauté.
Mais depuis le début de l’année, quelques surprises notables ont émergé. La plus frappante est la surperformance inattendue des indices boursiers européens, lesquels, il n’y a pas si longtemps, étaient encore considérés comme une espèce menacée en raison des risques d’une guerre tarifaire avec les États-Unis. Faut-il y voir un soupir de soulagement, parce que les tarifs d’importation américains auraient moins d’impact que redouté ? En partie, oui, mais ce serait prématuré de le dire.
Vent en poupe pour les banques.
Ce mouvement boursier est cependant porté par d’autres vents favorables. Pendant cette période très courte, mais marquante, depuis que l’Orchestre Philharmonique de Vienne a donné son concert du Nouvel An, plusieurs secteurs européens ont réussi jusqu’à présent à mieux performer que leurs homologues américains, quoique de manière limitée.
Et c’est l’indice sectoriel des banques commerciales européennes qui, dans un élan survitaminé, surpasse à peu près tout et tout le monde. Même les puissantes actions technologiques américaines ne peuvent actuellement rivaliser avec la charge de la cavalerie bancaire européenne. Et si l’on prend un point de comparaison antérieur, comme par exemple le 01/01/2021 (juste après la débâcle de la COVID-19), cet indice bancaire performe aussi bien que l’indice FANG, pourtant le plus tonique de tous les indices boursiers américains.
Graphique 1 : Évolution des indices boursiers américains et européens et de l’indice des banques commerciales européennes. (Indice de prix en monnaie locale)
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Surprenant, dites-vous. À juste titre, car le contexte ne semble pas, à première vue, favoriser le secteur bancaire européen. Et cela d’autant plus qu’il doit même envisager de nouvelles réductions de coûts pour investir dans l’automatisation et la protection contre la cybercriminalité.
En réalité, il ne faut pas chercher bien loin la cause de la poursuite de cette formidable flambée des actions bancaires : du côté passif de leurs bilans. L’écart croissant entre les coûts de financement et le taux interbancaire a doublé la marge financière, entraînant une hausse exceptionnelle des bénéfices d’exploitation.
Cette marge financière en forte croissance, appliquée à des volumes en hausse, a conduit à une augmentation inattendue des bénéfices bancaires, qui se manifeste pleinement aujourd’hui. N’oublions pas cependant que le taux directeur de la BCE est descendu à 2,75 % et devrait encore baisser de 50 points de base l’année prochaine.
En comparant les principales banques européennes cotées, on remarque de grandes disparités3. Toutes n’ont pas su transformer ces conditions favorables en gains boursiers. Nous maintenons pour l’instant une position élevée dans les banques européennes, tout en gardant un œil sur le long terme.
1 Ils ne pensent qu’à leur intérêt et après eux, le déluge.
2 On s’accorde à dire que les droits d’importation vont stimuler l’inflation aux États-Unis.
3 Nous avons analysé les performances boursières des 67 plus grandes institutions financières européennes au cours des cinq dernières années. L’indice prix des banques commerciales européennes a bondi de plus de 70 % pendant cette période. Les quatre banques ayant la plus grande capitalisation boursière, à savoir HSBC, UBS, Santander et Intesa, ont affiché des gains boursiers respectifs de 63 %, 136 %, 54 % et 73 %. Les meilleures performances sont à l’actif de quelques banques italiennes de taille moyenne, telles que Di Sondrio, BPM et Unicredit, ainsi que de la banque danoise Spar Nord, désormais rachetée, avec une hausse de plus de 200 %. À l’inverse, Crédit Agricole, KBC, Lloyds et Raiffeisenbank ont enregistré les performances les plus faibles, avec des rendements boursiers de seulement 16 %, 14 %, 12 % et 8 % respectivement au cours des cinq dernières années
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