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Patience, patience...
28 octobre 2021
Malgré la flambée alarmante de tous les indicateurs d'inflation, tant aux États-Unis que dans la zone euro, les bourses ont su faire preuve d'une grande bravoure. Les indices Nasdaq, S&P Composite et Dow Jones ont même récompensé les investisseurs qui leur sont restés fidèles avec une nouvelle fournée de cotations record, suivis vaille que vaille par les indices d'actions européens. Cette évolution témoigne d'une bonne dose de sang-froid puisqu'elle s'est produite sur fond de forte augmentation des prix de gros et de détail, mais aussi des cours de l'énergie et des matières premières, sans oublier les goulets d'étranglement dans les chaînes d'approvisionnement de l'économie.
Graphique 1 : Évolution des indices NYSE Fang, S&P composite, Nasdaq, Dow Jones et actions de la zone euro (indice prix en monnaie locale)
Les raisons de ce comportement courageux vous sont bien connues : selon le type d'inflation, l'impact sur les valorisations boursières peut varier fortement.
D'un côté, la montée des prix de l'énergie et des coûts de production peut provoquer la chute des indices d'actions parce que ce renchérissement tantôt se répercute sur le consommateur final (qui, dès lors, réduira son appétit pour les produits concernés), tantôt vient manger les marges bénéficiaires des entreprises qui s'avèrent incapables d'augmenter leurs prix pour compenser la hausse de leurs coûts. Une demande en baisse, combinée à des bénéfices des entreprises qui fondent comme neige au soleil, c'est le scénario catastrophe pour les cours des actions.
Toutefois, d'un autre côté, le niveau général des prix peut également augmenter, précisément en raison de la hausse de la demande des consommateurs, qui voient leurs rémunérations progresser, dans le contexte d'un marché du travail solide, et ce surcroît de revenus se traduit par des dépenses plus élevées. Dans un tel scénario, les entreprises sont parfaitement capables de demander des prix plus élevés pour leurs produits finaux et même d'étoffer leurs bénéfices, malgré une hausse de l'inflation. Ce qui débouche bien entendu sur une progression des cours boursiers.
D'un côté, mais d'un autre côté...
Next time, bring me a one-handed economist, y avait répondu un jour le président Reagan, agacé par cette indécision1. Lorsque ses collaborateurs, qui l'aidaient à mettre au point les plans destinés à remettre l'économie américaine sur de bons rails2, lui avaient demandé, quelque peu interloqués, ce qu'il entendait par là, Dutch3 leur avait répondu laconiquement qu'il en avait plus qu'assez d'entendre ses conseillers économiques lui dire sempiternellement : On the hand (…) but on the other hand (…).
La situation actuelle sur le front de l'inflation permet donc d'envisager les deux situations. Pour l'heure, nous concluons que la montée de l'inflation n'aura pas d'impact sur les bourses d'actions. Certes, la hausse des prix des matières premières et des biens intermédiaires a une incidence négative, mais celle-ci est compensée par l'augmentation de la demande de consommation et les excellents résultats d'entreprises qui sont publiés actuellement concernant le trimestre écoulé.
Graphique 2 : Relation entre inflation et returns des actions aux États-Unis. (Le graphique au-dessus de la ligne zéro indique qu'une hausse de l'inflation s'accompagne d'une progression des bourses. Sous la ligne zéro, les bourses baissent lorsque l'inflation augmente.)
Du moins pour l’instant. Cette conclusion est en effet éminemment tributaire de l'hypothèse d'une hausse des prix qui n'aurait qu'un caractère temporaire, qui s'effacerait donc au fil de la normalisation de l'économie et de l'élimination des goulets d'étranglement dans la chaîne d'approvisionnement.
Ce présupposé est cependant ouvertement remis en question, au point même que le président de la Fed, Jay Powell, a dû corriger sa position sur le caractère purement transitoire de cette poussée inflationniste. Cet ajustement a suffi pour revoir drastiquement les scénarios des relèvements attendus du taux d'intérêt directeur américain. Ainsi, la courbe des taux induit actuellement que le taux d'intérêt américain à court terme pourrait subir pas moins de 3 hausses de 25 points de base en l'espace d'un an, les deux premières intervenant même dans les six prochains mois. C'est sans doute un scénario excessif, mais ce ne serait tout de même pas une catastrophe parce que, à ce rythme, le taux directeur ne reviendrait à son niveau d'avant la crise du coronavirus que dans quatre ans.
Dans la zone euro aussi, les bonds des indicateurs d'inflation sont impressionnants. À présent, l'inflation moyenne attendue pour les cinq prochaines années dépasse l'objectif de 2 % de la BCE. Mais, jusqu'à présent, les bourses ne s'en émeuvent guère. Actuellement, les investisseurs professionnels actifs dans l'EuroLand se préoccupent davantage des corrections baissières continuelles des attentes conjoncturelles (récemment encore en Allemagne) et de la remontée du nombre de contaminations au covid. Cette recrudescence n'est cependant pas étonnante. La quatrième vague était inévitable et elle l'était d'autant plus après la décision téméraire d'autoriser les événements de masse. Les derniers chiffres ne mentent pas : on retrouve surtout les « plats pays » dans ces « premiers rôles » peu enviables. La Belgique semble même vouloir détrôner le Royaume-Uni dans le classement des pays les plus critiqués. Cette détérioration provoque naturellement une hausse du nombre d'hospitalisations, mais (heureusement) pas du nombre de décès. Bien au contraire.
L'économie chinoise voit elle aussi sa croissance connaître des ratés depuis quelques temps. Elle semble prise dans une tenaille à trois branches : une pénurie d'énergie, des mesures radicales de lutte contre toute résurgence du Covid-19 et la crainte d'un développement incontrôlé de la crise immobilière. Cette dernière freine l'activité dans le secteur, révélant ainsi au grand jour un niveau élevé de sous-emploi et un endettement excessif. Mais la crise actuelle en Chine permet aussi de purger différentes sources d'inefficience, ce qui peut favoriser une croissance économique plus saine dans un proche avenir. Il est cependant encore trop tôt pour anticiper une telle évolution.
Et nous en revenons ainsi aux États-Unis. Pourquoi en fin de compte devrions-nous chercher ailleurs ? Outre-Atlantique, l'économie s'essouffle également, ce qui se traduit par une baisse inattendue des taux d'intérêt à long terme. Mais cette baisse du tempo se remarque à peine, voire pas du tout, dans les résultats des entreprises, qui pour la énième fois d'affilée dépassent toutes les espérances. À ce jour, 40 % des entreprises ont publié leurs résultats du troisième trimestre, révélant pour 80 % d'entre elles de meilleurs chiffres que ceux attendus. Bien meilleurs même. Supply crisis ? What supply crisis ?
Mais, tout comme lors des trimestres précédents, on tente de tempérer quelque peu les perspectives positives en soulignant que le plus gros des effets de la pénurie de biens intermédiaires, de semi-conducteurs et de matières premières ne s'est pas encore fait sentir. Cette exhortation à la prudence effraie cependant de moins en moins.
Il n'en reste pas moins que nous tapons cette phrase sur notre clavier non sans une certaine fébrilité. En ce jeudi soir (28 octobre), nous attendons encore les résultats de quelques méga-entreprises comme Apple, Amazon et MasterCard. Les chiffres de ces géants peuvent soit briser net la tendance positive actuelle soit la renforcer sensiblement. Les investisseurs attendaient surtout les prévisions d'Apple pour le trimestre en cours. Un nouveau report du lancement du dernier iPhone par manque de microprocesseurs aurait été de nature à doucher leur enthousiasme.
Mais en restant fermement arrimés à notre stratégie d'investissement, nous réussissons à faire fi de l'écume des jours. Dans des phases intermédiaires telles que celles-ci, qui ne permettent pas encore de discerner clairement la voie que prendra l'économie, des ajustements sont parfois nécessaires. Dans ce cas, les tapissiers chevronnés savent ce qui leur reste à faire. Lorsque le mur n'est pas encore prêt à être recouvert de papier peint, on attend patiemment en chipotant ici et là.... Et nous prenons bien soin d'adopter cette attitude empreinte de sagesse.
Nous continuons ainsi à appliquer notre stratégie, en mettant toujours l'accent sur les facteurs qui nous ont réussi ces deux dernières années : une surpondération des actions, principalement dans les secteurs technologiques et lifestyle, de préférence aux États-Unis, complétée par des entreprises industrielles européennes de grande qualité. Du côté du paysage obligataire, ratisser un peu de rendement reste très difficile, mais nous y réussissons tout de même en surpondérant les obligations d'entreprises et d'État scandinaves et américaines, et en conservant nos positions en titres de la dette italienne.
Il ne nous reste donc plus qu'à passer quelques heures d'angoisse en attendant la publication des résultats d'Apple et d'Amazon. Si les échecs retentissants des Diables rouges et des cyclistes belges au Championnat du monde à Leuven ont renforcé notre capacité à endurer les déceptions, nous espérons ne pas devoir la solliciter cette fois-ci.
[1] Selon ses propres dires. Quant à savoir si cela ne relève pas de la légende, nous ne mettrions pas... notre main à couper. Reagan connaissait certainement la célèbre citation de Mark Twain : Never let the truth interfere with a good story…
[2] À l'époque, l'économie en avait bien besoin, après des récessions dévastatrices au milieu des années 1970 et 1980.
[3] Aux États-Unis, on appelait très souvent Ronald Reagan par ce surnom. Il ne faisait pas référence à son origine géographique (il était à moitié irlandais, à moitié anglais), mais à la coiffure que sa mère lui avait infligée durant ses jeunes années, simplement en posant un bol sur sa tête et en coupant ensuite tous les cheveux qui dépassaient.
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