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Rapport trimestriel Q3 2023
5 octobre 2023
Auteur: Matthieu De Coster, gestionnaire de fonds chez Argenta Asset Management
Le troisième trimestre a été marqué par de nouvelles hausses des taux d'intérêt. Les banques centrales ont relevé les taux à court terme et désormais les taux d’intérêt des obligations à long terme augmentent également. Cela a provoqué de nouvelles baisses des cours obligataires. L’économie a pour l’instant bien résisté à ce coût monétaire plus élevé. Les consommateurs semblent faiblir, mais cela est compensé par les importantes mesures de relance budgétaire mises en place par les gouvernements. Les fonds essentiels ont connu une évolution très similaire.
Le contexte macro-économique
Récession : oui ou non ?
Depuis le début de la lutte contre l’inflation en 2022, la question a toujours été de savoir si les banques centrales peuvent augmenter les taux d’intérêt jusqu’à ce que l’inflation soit suffisamment faible, sans briser complètement l’activité économique.
Aujourd’hui, nous nous situons dans une phase de hausse des taux d’intérêt et de déclin de la croissance économique. Le point de basculement où la croissance ralentit tellement que le produit intérieur brut se contracte pendant deux trimestres consécutifs est ce qui définit une récession. La plupart des économies n’en sont pas là aujourd’hui et l’incertitude demeure quant à savoir si cela se produira. Dans le passé, une récession provoquait en moyenne une baisse du marché boursier de 21 %. Il existe pour le moment un consensus plus large sur le fait que tout déclin de croissance aux États-Unis et dans d’autres économies occidentales serait plutôt limité – mesuré par l’ampleur de la contraction, sa durée et ses perspectives. L'Allemagne est déjà en récession aujourd'hui, mais la contraction totale de -0,5 % est faible par rapport aux -7 % de 2008.
Les mécanismes de la récession (et de la reprise)
Au début de la lutte contre l’inflation, l’économie résiste généralement bien, grâce à une solide confiance des consommateurs et aux bons résultats des entreprises. Cependant, au fil du temps, ces deux éléments s'affaiblissent, sous la pression de l'inflation, du renchérissement des prêts hypothécaires et des prêts aux entreprises et de la baisse de la confiance économique, autant d’éléments qui incitent à la prudence.
Au moment où cela se reflète dans les résultats d’entreprises et s’il n’y a aucune perspective d’amélioration rapide, les marchés boursiers chutent. L’augmentation du chômage et la baisse du produit intérieur brut sont généralement aussi une conséquence logique. L’inflation (ou les attentes d’inflation) chute alors très rapidement, après quoi la banque centrale peut passer d’une politique restrictive à une politique expansionniste. Cela donne de l’oxygène à l’économie, avec une première très bonne période, notamment pour les obligations. Par la suite, la croissance économique peut également s’améliorer.
Dans ce rapport, nous associons la croissance économique aux actions et l’inflation aux obligations.
Les actions et la croissance économique
Ce graphique montre l’évolution des 3 dernières années. Aux États-Unis, le marché boursier dans son ensemble n'a chuté que de 2,9 % par rapport à son plus haut de 2021. L'indice technologique Nasdaq (ligne rouge) a chuté de 10,6 % et l'indice des petites entreprises (ligne orange) a chuté de 11,3 %. Il est utile d’examiner également les petites entreprises, car quelques grandes entreprises peuvent à elles seules créer une image globale déformée. En Europe et au Japon, les actions ont fortement rebondi cette année, nous laissant respectivement à peine 3,8 % et 4,4 % en dessous des plus hauts. Les pays émergents, groupe important et très divers, ont chuté de 17,2 %.
Les marchés émergents
Au sein des marchés émergents, l’Asie a toujours été un puissant moteur de croissance. Mais aujourd'hui ce moteur connaît des ratés. La Banque mondiale, un institut de coopération au développement, a abaissé ses prévisions de croissance pour l'Asie de 4,8 % à 4,5 %. Il s’agira du taux de croissance le plus lent depuis les années 1960, hormis quelques situations de crise ponctuelles comme celle du Covid-19. Il n’y a pas de cause claire, mais nous constatons que les dépenses de consommation après Covid-19 sont retombées plus rapidement que prévu. En Chine, il existe également un problème supplémentaire lié au secteur immobilier, qui ne peut plus supporter le lourd fardeau de la dette. Et comme l’Asie du Sud-Est produit de nombreux biens pour le monde entier, le ralentissement global y laisse des traces.
Les États-Unis
Plus profondément, la mondialisation est également en train de changer de visage. Les pays occidentaux tentent de protéger leurs propres industries en augmentant les taxes à l’importation, par exemple sur les voitures électriques. Les entreprises américaines sont également incitées, par le biais de droits d'importation, à implanter leurs installations de production dans les pays de l'ALENA (Canada, États-Unis, Mexique). Cette tendance est appelée « nearshoring », en opposition au « offshoring ». La stabilité sur le plan politique et logistique devient au moins aussi importante que la recherche du moindre coût. Le gouvernement américain octroie également d'importantes subventions par le biais du « Chips and Science Act » et du « Inflation Reduction Act » pour développer autant que possible les secteurs sensibles des semi-conducteurs et de l'énergie en interne.
De grands projets d’infrastructures sont également prévus aux États-Unis. Ces gigantesques plans de relance brisent la logique du positionnement dans le cycle économique. Le secteur de la construction, qui est un secteur cyclique par excellence, devrait en théorie progressivement souffrir de pertes d'emplois et d'une activité réduite. Le secteur privé subit en effet les retombées des taux d'intérêt hypothécaires élevés (+7 % !). Et pourtant rien que cette année, plus de 100 000 emplois ont été créés dans le secteur de la construction. Et cela est effectivement dû aux nombreux projets publics en chantier.
Ces mesures de relance du gouvernement américain vont à l'encontre de la politique monétaire de sa banque centrale. Cette dernière souhaite plutôt que l’économie se refroidisse alors que le gouvernement jette non pas de l’huile, mais de l’électricité verte sur le feu. Cela explique la forte résistance que l’on constate encore dans les chiffres PMI. Un nombre supérieur à 50 signifie que les directeurs d’achats constatent une expansion par rapport au mois précédent.
Les résultats d’entreprises
Les prix plus élevés des intrants et des coûts de main-d’œuvre en hausse sont répercutés par les entreprises dans un prix final plus élevé. Dans de nombreuses activités économiques, il y a probablement trop peu de concurrence entre les entreprises pour parvenir à un prix final véritablement compétitif. C’est la raison de la persistance de l’inflation. Ce phénomène continuera jusqu'à ce que le consommateur dépose les armes. De nombreux consommateurs sont déjà sous pression, mais d’autres ont encore des économies héritées de la période Covid-19. Nous scrutons donc avec attention la publication des résultats, trimestre après trimestre. Cela donne un aperçu de la marge bénéficiaire, du chiffre d’affaires et des attentes formulées par les entreprises elles-mêmes. Grâce aux économies de coûts et aux gains de productivité et à un consommateur plus résilient que prévu, les bénéfices futurs ont même pu être révisés à la hausse courant 2023.
Nous attendons désormais avec impatience les résultats du troisième trimestre et les perspectives ultérieures. Nous avons constaté à plusieurs reprises que les sociétés cotées ne sont pas toujours le parfait reflet de l’économie. On parle ici des entreprises les plus efficaces. Dans un scénario favorable, la vague d’applications dans le domaine de l’intelligence artificielle se traduira aussi progressivement par une productivité plus élevée pour les entreprises qui disposent de la taille requise pour investir dans l’IA.
Positionnement au sein des actions
Nous en concluons que pour les actions, une sous-pondération est appropriée à l’heure actuelle, compte tenu de la pression que les taux d’intérêt élevés exercent sur la consommation. Nous maintenons une sous-pondération modérée de 4 % par rapport au poids neutre. La croissance économique ralentit, mais il ne s’agit pas d’un krach et les perspectives d’ici un à deux ans restent favorables. Les révolutions technologiques dans le monde des données sont aujourd’hui si spectaculaires que l’on ne peut exclure un bond majeur en matière de productivité.
Sur le plan géographique, nous préférons les États-Unis, principalement portés par la forte position concurrentielle de leurs entreprises. Les plus fortes surpondérations par rapport à un positionnement neutre sont réservées à l'Inde et au Japon, où les bénéfices des entreprises ont bien évolué. L’Inde a peut-être un marché boursier relativement cher, mais son économie est soutenue par une main-d’œuvre en croissance et est relativement à l’abri des conflits géopolitiques.
Les positions sur les actions chinoises ont encore été réduites au cours du dernier trimestre. Nous considérons les problèmes d'endettement du pays comme trop systémiques pour espérer une amélioration significative à moyen terme. Les bons résultats opérationnels en Inde et la forte décorrélation de ce marché avec les autres pays nous ont amenés à y renforcer une nouvelle fois nos positions. Son économie est surtout tournée vers l’intérieur et est donc moins sensible aux chocs extérieurs.
Nous maintenons notre confiance dans nos thématiques au sein des actions. Nous élaborons une planification à long terme et investissons dans ces entreprises tout au long du cycle économique. Il est impossible de prédire le moment exact où le rendement boursier suivra. Avec la forte hausse des taux d’intérêt que nous observons cette année, nous n’aurions par exemple pas parié sur la « New Tech » comme le meilleur thème depuis ce début d’année
Les obligations et l’inflation
La chute des marchés obligataires
Les obligations ont déjà atteint des planchers historiques :
La chute des obligations d'État a été exceptionnellement forte, de 26 % aux États-Unis depuis le début du Covid-19, de 20 % au niveau mondial et de 28 % en Europe. Les obligations d’entreprises ont connu une situation similaire. Récemment, le rendement américain des obligations à 10 ans a dépassé 4,5 %. Ce niveau de 4,5 % est le taux d’intérêt moyen observé depuis 1798, la date la plus éloignée que nous pouvons suivre. Nous pouvons donc désormais officiellement parler d’un taux d’intérêt élevé. La bonne nouvelle est donc que les rendements courants de ces obligations ont fortement augmenté :
Les facteurs d’évolution de l’inflation
Pouvons-nous considérer ces baisses historiques de cours comme une grande opportunité ou y a-t-il un changement de régime vers des taux d’intérêt durablement plus élevés ? Les taux d’intérêt à long terme sont fonction de la croissance économique et de l’inflation. La tendance pour les deux éléments est à la baisse, mais elle est plus lente que prévu initialement.
L’économie américaine en particulier résiste bien et l’inflation fait de même en raison des loyers élevés, de la hausse des prix de l’énergie et de l’inflation des salaires. Les mesures de relance du gouvernement américain et le nearshoring n’y sont pas étrangers.
L’inflation des salaires est en partie alimentée par un chômage historiquement bas. C'est le cas aux États-Unis, mais le chômage diminue également en Italie par exemple. Pour beaucoup, ce dernier élément est le signe que l’économie américaine (mais aussi européenne) est forte et qu’une récession n’est pas imminente. La question est de savoir si chaque travailleur dispose d’un pouvoir d’achat important. Nous voulons souligner ici la situation démographique, qui montre que plus de personnes partent à la retraite que de nouvelles personnes entrent sur le marché du travail. Cela signifie que l’inflation pourrait persister beaucoup plus longtemps qu’au cours des 20 dernières années, et qu’un taux d’inflation compris entre 2 % et 3 % serait alors probablement un objectif plus réaliste que les 2 % actuellement visés.
Le faible taux de chômage et le recul de la mondialisation sont des facteurs qui accroissent l’inflation. Ces effets seront compensés dans une certaine mesure par une productivité plus élevée. Cela détermine ensuite l’inflation à long terme et, ensemble avec la croissance économique, les taux d’intérêt à long terme. « Les taux d’intérêt à long terme restent bas » était le postulat qu’on avançait précédemment. Aujourd’hui, on ne sait pas exactement où se situe cet équilibre des taux d’intérêt.
Mais aujourd’hui, la situation de l’offre et de la demande joue également un rôle ; les banques centrales mettent désormais sur le marché les obligations qu’elles avaient achetées pendant le Covid-19. Cela fait baisser les cours des obligations et fait monter les taux d’intérêt. Pour les États-Unis, l’important déficit budgétaire et la dette publique totale constituent également un facteur constamment débattu.
Positionnement au sein des obligations
Nous concluons qu'une surpondération est appropriée pour les obligations. La rémunération sur les obligations devient chaque semaine plus intéressante. Les résultats à court terme restent certes très incertains. La hausse des taux d’intérêt est très forte, ce qui laisse penser que cette tendance se poursuivra pendant un certain temps.
Les obligations polonaises ont été vendues le trimestre dernier, après une relative baisse des taux d’intérêt. Les tensions géopolitiques se sont accrues aux frontières nationales et, d’un point de vue économique, les anticipations d’inflation n’étaient pas non plus très favorables. Pour le même rendement attendu, on peut prendre des positions moins risquées aujourd’hui. Nous avons maintenu notre pondération des pays émergents constante à 8 % de la partie obligataire, avec une pondération accrue des positions diversifiées mondialement. Ici, des investissements sans risque de change ont été choisis compte tenu de la force du dollar américain.
La forte sous-pondération des obligations du Royaume-Uni a été partiellement éliminée. Après le pessimisme post-Brexit et l’affaiblissement de la monnaie britannique, l’inflation s’oriente enfin dans la bonne direction. En outre, des mesures de relance économique sont nécessaires, ce qui permettrait de réduire les taux d'intérêt dès que l'inflation sera maîtrisée. Cela peut profiter aux obligations.
Chaque fois que les taux d’intérêt à long terme ont augmenté, nous avons relevé progressivement la durée moyenne de nos obligations. De cette manière, nous garantissons un rendement potentiel plus élevé dès que les taux d’intérêt recommencent à baisser. Si le taux d’intérêt ne baisse pas mais reste stable, nous avons aussi assuré un rendement courant plus élevé. La durée moyenne de notre portefeuille obligataire est aujourd'hui d'environ 5,5 ans. Le rendement courant moyen est supérieur à 4,6 %.
Nous optons généralement pour des obligations bénéficiant d’une notation de crédit élevée, souvent des obligations d’État. Dans certaines niches, nous optons pour des obligations à haut rendement, dans une optique de diversification en termes de durée, de géographie, de risque politique et de crédit.
Conclusion
Notre allocation d'actifs est assez proche du positionnement neutre.
Nous n’observons pas d’ « inefficiences de cours » évidentes sur le marché aujourd'hui, mais nous constatons une grande incertitude qui nous maintient proche de ce positionnement neutre. Cette incertitude diminue cependant si on réfléchit et investit davantage sur le long terme. C'est pourquoi nous gérons avec la constance nécessaire.
La même philosophie continue de s'appliquer aux investisseurs : rester toujours positionné sur le marché avec un portefeuille d'investissement large et diversifié à l'échelle mondiale qui correspond en tous points à votre profil de risque. Les pertes actuelles du portefeuille obligataire ne devraient pas être un argument pour évaluer différemment ce profil de risque.
Dans nos fonds essentiels, nous recherchons les segments qui restent valorisés de manière attractive dans un contexte de ralentissement de la croissance et d'inflation certes élevée mais en recul. Par ailleurs, nous conservons un « amortisseur » partiel si les marchés chutent à nouveau. Un équilibre entre les deux reste important en période d’incertitude.
Nous restons entièrement concentrés sur la gestion attentionnée et professionnelle des investissements de nos clients. Au quotidien et en toutes circonstances.
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